L'humour, toujours l'humour...

Vous avez peut-être entendu parler de cette pétition, portée par une association chrétienne américaine (liée à la Fondation Américaine pour une Civilisation Chrétienne !), qui a récolté plus de 20000 signatures sur Internet. Elle demandait à Netflix de retirer de son catalogue la mini-série Good Omens, adaptation du roman éponyme écrit par Terry Pratchett et Neil Gaiman. Petit problème au passage : la série n'est pas sur Netflix mais sur Amazon Prime... ce qui a bien fait sourire sur les réseaux sociaux !

Mais au-delà de cette erreur de destinataire, cette nouvelle pétition (ce n'est pas la première lancée par cette fondation, et d'autres l'ont aussi fait) pose la question de la pertinence, au nom de sa foi chrétienne, d'une telle démarche. A-t-on raison de s'offusquer dans de pareils cas, de crier au blasphème ? Doit-on vraiment dépenser autant d'énergie pour "défendre" l'honneur de Dieu et de la Bible ? 

Autant le dire tout de suite : j'ai vu la mini-série avec plaisir, et j'avais même déjà lu le roman (De bons présages, en français), que j'avais vraiment apprécié et qui m'avait fait beaucoup rire. Alors vous l'aurez compris : je n'ai pas signé la pétition !!! 

Good Omens raconte l'histoire d'un ange, Aziraphale, et un démon, Crowley, devenus amis à force de se fréquenter sur terre depuis quelques milliers d'années. Alors qu'ils apprennent que la bataille finale d'Armagueddon approche, ils vont unir leurs efforts pour empêcher la fin du monde. Parce que, finalement, ils se sentent bien sur cette bonne vieille terre, parmi les humains... 

Qu'est-ce que la pétition reproche à la série ? De banaliser le satanisme, de nier la différence entre le bien et le mal, de se moquer de Dieu - qui plus est, en confiant à une femme d'incarner la voix de Dieu ! Je ne suis pas sûr que les auteurs (et encore moins les signataires) de la pétition aient vraiment regardé la série ou lu le livre, mais si c'est le cas, je crains qu'ils n'aient pas compris l'ironie de l'histoire... Alors bien-sûr, je peux comprendre que tout le monde n'apprécie pas ce genre d'humour. Je peux aussi comprendre que des croyants puissent être mal à l'aise à la lecture d'une histoire qui joue avec ironie des symboles bibliques. Mais je ne comprends pas qu'on crie au scandale ou au blasphème... Je suis profondément attaché à la liberté d'expression, notamment dans le domaine artistique, et je défendrai aussi toujours la liberté de rire et d'ironiser, l'importance de l'humour, voire de l'impertinence, même si ça chatouille ou si ça grattouille un peu... 

Dans le cas de Good Omens, on peut même dire que pour pleinement profiter de l'histoire, pour saisir, et s'amuser, des nombreuses références, il vaut mieux connaître la Bible (ce qui était visiblement le cas de Terry Pratchett et Neil Gaiman) ! Je vois même Good Omens comme un cousin pas si lointain que ça d'un classique de la littérature chrétienne anglo-saxonne : le génial Tactiques du diable, écrit par C.S. Lewis (le fameux créateur des Chroniques de Narnia). Sous-titré Lettres d'un vétéran de la tentation à un novice, cet ouvrage, lui aussi plein d'ironie, se présente sous la forme d'un recueil de lettres adressées par Screwtape, un démon expérimenté, à un apprenti démon, pour lui donner des conseils dans sa façon de tenter un jeune chrétien. Il y a, selon moi, une parenté évidente entre les deux ouvrages. Sauf, bien-sûr que C.S. Lewis a écrit son livre en tant que croyant avec une intention spirituelle et théologique, alors que Terry Pratchett et Neil Gaiman ont juste voulu s'amuser... Même si, en passant, l'histoire permet quand même d'évoquer des thèmes comme le libre arbitre, par exemple. 

Je me dis qu'un jour, peut-être, je lancerai une pétition contre les chrétiens qui n'ont pas d'humour. Euh... c'est de l'ironie, bien-sûr ! 

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NB : Je vais quand même le dire : je crois bien-sûr que nous devons reconnaître l'existence du satanisme et les dangers de pratiques occultes, je suis convaincu que nous devons maintenir un distinction entre le bien et le mal, et en tant que chrétien je respecte profondément mon Dieu (qui, j'en suis convaincu, a bien plus d'humour qu'on veut bien le dire...). Par contre, je ne sais pas si sa voix est masculine ou féminine...